M. Kombucha III (fromage frais)

Dans La Tribune ce samedi, il y avait un article sur ce que le COVID-19 changera dans nos assiettes, article pour lequel j’ai répondu à quelques questions. Grosso modo, on devrait davantage fermenter si l’on veut atteindre l’autosuffisance alimentaire au Québec. Pour faire suite aux précédents articles sur le kombucha et la choucroute, voici donc un tutoriel sur comment faire du fromage frais à la maison. C’est une alternative zéro déchet (si vous achetez votre lait en pinte de verre), économique et durable.

En plus d’être zéro déchet, je trouve que le goût du fromage frais maison est meilleur que ce que l’on trouve au super-marché. Donc, première étape, faire chauffer votre lait dans un chaudron jusqu’à atteindre la température de 80 degrés Celcius (pour tuer les microbes).

Ceux qui n’ont pas de thermomètre, retirer le lait du feu dès qu’une peau se forme à la surface. Il est important de chauffer le lait lentement, car on ne veut pas qu’il bouille: cela altère les protéines et le fromage n’aura pas la consistance voulue.

Vous devez vous être procuré, en plus du lait, un ferment et de la présure. Le ferment pourrait être une partie de votre fromage précédent. Vous pourriez aussi vous servir d’une ou deux cuillerées à soupe d’un fromage artisanal acheté au marché, mais pas un fromage industriel. Les cultures bactériennes utilisées par l’industrie agroalimentaire sont sélectionnées pour avoir un résultat constant, leur écosystème n’est donc pas complet et, après deux ou trois générations, le ferment finit par ne plus fonctionner. Vous pourriez aussi vous procurer dans le Web un ferment qui vous durera indéfiniment. Personnellement, j’ai acheté le mien ici il y a trois ans et je n’ai pas eu à en racheter depuis. Pour ce qui est de la présure, j’ai commencé avec de la présure végétale, qu’on peut trouver sur le même site. Cette présure végétale est composée d’herbes qui ont le même effet que la présure qui se retrouve à l’état naturel dans l’estomac des veaux.

Mon lait refroidi, ma présure et un peu de fromage de ma production précédente

La présure fait coaguler le lait et permet au veau de le digérer. En vieillissant, la présure cesse d’être produite dans l’estomac des jeunes ruminants, qui se mettent à manger de l’herbe. Quand j’ai eu fini ma bouteille, j’ai voulu comparer avec de la vraie présure animale. Je trouve le résultat meilleur, personnellement, mais je comprends que les végétariens n’aimeront pas cette idée. Certains utilisent à la place de la présure quelques gouttes de jus de citron, d’autres la sève des figuiers, mais on s’entend que ni les citrons ni les figues ne poussent au Québec.

Quand le lait a refroidi jusqu’à atteindre une température de 30 degrés Celcius (on ne veut pas tuer les bactéries avec une température trop haute), on introduit une cuillerée à soupe de ferment par litre de lait et le nombre de gouttes recommandé par le fabriquant de votre présure, dans mon cas environ huit. On mélange vigoureusement le tout avec un fouet propre pour amalgamer le ferment et la présure au lait. On recouvre et on met au four toute la nuit avec la lumière allumée. Le lendemain matin, votre lait va avoir coagulé (grâce à la présure) et une légère acidité va être perceptible (résultat de la lactofermentation).

Le fromage s’est formé et flotte dans le petit-lait

On verse alors délicatement le fromage dans une passoire dont a tapissé le fond d’un coton à fromage. On saupoudre de sel le fromage pour donner du goût, mais aussi pour faire exsuder le fromage.

Puis on recouvre d’une assiette, ce qui va aider, en compressant le fromage, à exsuder encore davantage de petit-lait de notre fromage.

Ce petit-lait va s’écouler dans le chaudron sous notre passoire. Il ne faut pas le jeter! C’est plein de protéines. Les fameuses poudres consommées par les adeptes de musculation sont pour la plupart faites avec du petit-lait, sous-produit de l’industrie laitière. Nous verrons dans un autre article comment utiliser ce petit-lait pour faire du pain au levain.

On laisse le petit-lait s’écouler ainsi toute la journée. Le soir, on retire l’assiette et on prélève une ou deux cuillerées à soupe de fromage (selon la quantité de fromage que l’on compte produire la prochaine fois) et on les met dans un bocal hermétique que l’on identifie, puis on le met au réfrigérateur, dans la partie la plus froide, soit au fond. Il est important d’identifier votre bocal avec, par exemple, les mots «Starter: ne pas manger!» pour éviter, comme ça m’est arrivé, que votre mère ne le mange pour ensuite vous dire qu’il était bien bon! Heureusement, il me restait un sachet du ferment en poudre acheté en ligne. Il était au congélateur depuis deux ans, mais il a repris et est très actif maintenant.

On verse le petit-lait dans un bocal étanche que l’on met dans le frigo pour notre prochain pain. Enfin, on met le fromage frais dans un bocal qui ferme bien.

Le ferment, le fromage, le petit-lait (tout ça avec seulement un litre de lait!)

Vous pourriez à ce stade (après avoir prélevé votre ferment) ajouter des herbes (ex.: du thym), des épices (ex.: piments broyés), des condiments (ex.: ail haché). Personnellement, je préfère ajouter ces ingrédients au fur et à mesure et, en général, j’aime bien le goût du fromage frais en soi. Comme son nom l’indique, c’est un fromage frais et qui doit, donc, se manger assez rapidement, assurément en une semaine. D’où l’importance de faire de petites quantités à la fois. Le mieux est de se créer une routine, en produisant toujours les mêmes quantités et en articulant sa production fromagère avec sa production boulangère, comme nous le verrons bientôt.

On peut bien sûr tartiner le fromage frais sur une tranche de pain au levain fraîchement sorti du four: c’est carrément génial. On peut en faire une trempette pour les légumes en ajoutant les ingrédients suggérés plus tôt. On peut aussi l’incorporer à des pâtes avec un peu de leur eau de cuisson pour s’assurer que le fromage adhère bien à celles-ci. C’est délicieux, mais par contre la chaleur tue les bactéries et, donc, on perd le rôle des probiotiques. On peut aussi garnir des raviolis avec du fromage frais. Et si l’on ajoute un peu de sucre au fromage dans nos raviolis, on obtient un dessert typique russe: les vareniki. Ces derniers sont déclinés de bien des façons en Russie et vous pourriez remplacer le sucre par de la confiture ou de la gelée de petits fruits. Les possibilités sont infinies… Bon appétit!

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2 commentaires

  1. François

    Bonjour, est-ce que ce fromage est semblable au « Quark » utilisé en Allemagne ? Merci de partager.

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